Congrès des administrateurs territoriaux

Congrès des administrateurs territoriaux

Congrès des administrateurs territoriaux – Septembre 2022

Cette année le congrès des administrateurs territoriaux avait pour thématique la collaboration. J’ai été sollicitée pour présenter mes travaux de recherche sur le sujet et notamment une recherche-action qui visait à identifier comment favoriser la collaboration. Mais avant de s’attaquer à ce chantier, il est nécessaire de bien comprendre de quoi l’on parle…

Il est de plus en plus courant de parler de collaboration ou encore de coopération lorsque l’on évoque le fait que des membres d’une même équipe travaillent ensemble. Cependant, il existe plusieurs modalités pour travailler ensemble, prenons les plus courantes dans les organisations de travail actuelles : la coordination, la collaboration et la coopération :

  • La coordination est principalement axée sur la généralisation des meilleures pratiques identifiées. Il s’agit essentiellement de :
    • Planifier et d’organisation des activités.
    • D’ordonnancer des comportements, des actions ou encore des décisions.

La coordination est une culture de travail en réponse à un environnement simple et récurant mais elle ne peut mener à la création de nouveauté.

  • La collaboration est très souvent mise en place en parallèle de l’organisation principale, il s’agit du fameux mode projet qui implique :
    • Un engagement mutuel des participants sur un objectif commun.
    • Des efforts coordonnés avec une autorité identifiée.

La collaboration permet une flexibilité pouvant mener à des innovations limitées.

  • La coopération vise à développer de l’innovation par un maximum d’agilité et de flexibilité. Cette culture de travail nécessite :
    • Une grande autonomie de la part des participants qui cherchent avant tout à apporter une valeur ajoutée dans une démarche collective.
    • Une capacité à travailler ensemble.
    • Le recours à des outils collaboratifs facilitant les flux de travail et les échanges d’informations.

La coopération permet une organisation agile qui mène facilement à la création d’innovations.

C’est principalement l’introduction des TIC (technologies de l’Information et de la Communication) dans les entreprises qui a favorisé l’émergence de nouvelles formes collaboratives de travail, les outils dits collaboratifs favorisant une logique participative et une certaine liberté de parole et de ton cassant les barrières des organisations cloisonnées et hiérarchisées. Les entreprises voient en ces évolutions technologiques l’occasion d’insuffler une nouvelle culture organisationnelle, remettant en cause les processus décisionnels et favorisant les interactions entre les employés afin de les rendre plus autonomes et innovants. Bien que les TIC et les environnements collaboratifs de travail (les open-spaces et flex-offices notamment) soient mis en place dans les entreprises, il n’est pas rare que la collaboration attendue de la part des salariés rencontre des difficultés à se mettre en place. Voici quels sont les freins et les facteurs favorisant les transformations de cultures organisationnelles :

  • Les freins rencontrés dans les changements de culture organisationnelle de travail :
    • Les difficultés à s’approprier les nouveaux outils technologiques.
    • Un appauvrissement du sens au travail car les outils ont remplacé certaines tâches.
    • Des remises en question de la pertinence de sa fonction (notamment les fonctions managériales)
  • Les facteurs facilitant les changements de culture organisationnelle de travail :
    • Les six catégories de facteurs favorisant les changements culturels et organisationnels (Matessich,1986) : les facteurs relatifs à l’environnement de travail (espaces et outils), les facteurs liés aux membres de l’équipe (compétences et potentiel), les facteurs liés au process/structure, les facteurs liés à la communication (notamment des attendus), les facteurs liés aux objectifs (en lien avec le type d’organisation du travail attendue), les facteurs liés aux ressources.
    • Les trois profils types de collaborateurs et de coopérateurs nécessaires à la diffusion de la nouvelle culture de travail au sein de l’organisation (Sheen, 2014) : les “cooperators” (influenceurs), les “réciprocators” (masse critique), les “free riders” (part de ceux qui seront toujours réfractaires au changement).
    • Un changement de culture par « paliers » : de coordination à collaboration puis de collaboration à coopération (Chevallier et Coallier, 2019)

 

Ces modes de fonctionnements basés sur l’autonomie et la liberté des échanges et des objectifs de travail posent la question de la place des fonctions managériales dans les cultures de travail collaboratives. Face à ces nouveaux modes de travail on peut se poser la question de la place et du rôle du management. Effectivement, le rôle et le positionnement du management doit nécessairement évoluer pour s’adapter à ces nouvelles formes de travail qu’il aura à accompagner en :

  • Créant les conditions de la collaboration/coopération : à savoir adopter une posture qui va plus loin que la coordination d’équipe et qui consiste à mettre en lien les membres de l’équipe pour que des connexions se fassent, composer une équipe qui fonctionne mais aussi favoriser l’intégration des connaissances des employés, non seulement internes, mais aussi externes.
  • Étant un ambassadeur des bonnes pratiques : Le manager incarne la figure du changement organisationnel en mettant en place un nouveau mode de fonctionnement compatible avec les attendus de la nouvelle organisation (des habitudes de fonctionnements, des rites…).
  • Donnant du sens au travail : c’est-à-dire accompagner chacun dans la compréhension et dans l’application concrète du nouveau mode de fonctionnement, expliquer les nouvelles pratiques attendues.

Pour conclure, les réaménagements d’environnements de travail et l’ajout de nouveaux outils technologiques ne peuvent à eux seuls conduire à une culture de la coopération. Il est nécessaire d’accompagner ce changement en communicant sur les principes et les attendus de la collaboration/coopération. Le changement de paradigme sur les modes de travail s’acquiert de manière progressive et par « imitation » des « coopérators ». C’est pourquoi le processus conduisant à l’implantation d’une culture de la coopération et de l’innovation en entreprise sera plus facilement accessible par le passage au préalable par une culture de la collaboration. Enfin, ces changements ne sauraient avoir lieu sans l’appui du management dont le rôle consiste à montrer l’exemple et en donnant du sens au changement.