Élodie Chevallier
Décoder les sens du Travail : de la Parole des professionnels à la recherche-action
C’est en écoutant le discours des professionnels et notamment des cadres que j’ai accompagnés dans ma carrière de professionnelle des ressources humaines, que j’ai compris que la plupart des insatisfactions au travail venaient d’un manque de sens. Ne plus trouver de finalité à son travail, ne plus se reconnaître dans sa posture professionnelle, ne plus se retrouver dans le fonctionnement de son organisation, tels étaient les sentiments qui étaient exprimés à titre individuel. Au niveau collectif, je faisais le constat d’organisations précisément désorganisées, ne sachant plus comment fonctionner, comment collaborer, comment motiver et donc comment nourrir le besoin de sens au travail.
Ces témoignages et ces expériences vécues m’ont menées à investir plus en profondeur le sujet des sens au travail.
Une recherche scientifique me semblait la méthode la plus sérieuse pour comprendre, documenter et expérimenter le sujet des sens au travail. Je sentais le besoin de dépasser ma position de professionnelle des ressources humaines dans « l’action » pour aller vers une posture de chercheuse, prenant le temps de la réflexion. J’ai mené ma thèse avec le désir de mieux comprendre et mieux accompagner les personnes en quête d’un travail qui leur apporte du sens, et les organisations qui cherchent désespérément comment rendre le travail porteur de sens. Je voulais explorer pour mieux éclairer, comprendre pour mieux agir.
J’ai choisi de réaliser ce projet au sein d’une Université Canadienne pour enrichir ma réflexion d’une culture et d’une approche différente du travail. Ma recherche s’est centrée sur les ruptures intentionnelles de carrière des cadres souhaitant redonner du sens à leur vie professionnelle. A partir d’une enquête auprès de ceux qui ont « sauté le pas », j’ai identifié les principaux motifs, individuels et collectifs, de perte de sens au travail. J’ai décrit le processus de perte progressive de sens au travail et les signaux permettant d’en reconnaître les différents stades. J’ai proposé des leviers d’action concrets qui permettraient de redonner du sens au travail.
« Je sentais le besoin de dépasser ma position de professionnelle des ressources humaines dans l’action pour aller vers une posture de chercheuse, prenant le temps de la réflexion ».
Après avoir soutenu ma thèse, il m’a semblé évident que, tout le savoir produit devait en premier lieu être proposé aux professionnels et aux organisations. C’est l’ambition que je me suis donnée en créant mon activité de recherche-conseil : accompagner à repenser les sens du travail pour redonner au travail toute son essence. Depuis 2018, j’aide des structures publiques ou privées qui, à l’occasion d’un projet d’évolution de leurs modes de travail (réorganisation, fusion, digitalisation…) souhaitent repenser leur propre approche du travail. Pour cela, je les éclaire en leur apportant le savoir scientifique, je les accompagne dans la mise en place de leurs projets et je les aide à évaluer l’impact de leurs actions sur leurs salariés.
Mon sujet de recherche et l’ensemble de mon parcours professionnel répondent à une conviction profonde, militante même. J’ai observé la déshérence de nombreuses personnes et de multiples organisations. Nous avons des solutions à trouver pour que de nouveaux sens émergent dans les structures de travail. Nous avons à changer certaines manières de faire, de travailler, de manager. Pour cela, commençons par observer, par comprendre et analyser ; en partant du réel, nous trouverons, pour chacun, comment opérer pour que des sens adéquats, et donc plus durables, soient trouvés.
